vendredi 31 mai 2013

Partie 4 de mon éveil à la lecture...

De mon éveil à la lecture jusqu'à l'écriture de Martinou et Pirouly
Premiers encouragements à l'écriture (partie 4) 

Quand, en sixième, lors de la première réunion parents / professeurs, maman lâcha que je lisais toujours de la bibliothèque rose sans jamais m'être intéressé à la verte, mes professeurs me regardèrent avec condescendance et s'étonnèrent qu'un enfant si bon élève, soit si attardé dans ses goûts de lecture. Je lus alors en cachette le Club des Cinq, et laissai quelques bouquins de la bibliothèque verte appartenant à mon frère sur ma table de nuit pour faire diversion (c'était Langelot l'agent secret, dont je n'ai jamais lu une seule ligne) et me donner bonne conscience. 

Parallèlement je rédigeai MON aventure du Club des Cinq sur des feuilles de papier A4 que je pliai en deux pour leur donner le format poche. J'y laissai même des demies pages en blanc afin d'y insérer les traditionnelles illustrations de ce format. Quand j'eus terminé, je montrai tout fier le livre terminé à mon oncle Roger, l'artiste de la famille, qui s'enthousiasmait toujours pour le côté créatif des enfants. Ce fut le premier à m'encourager à continuer. J'avoue que l’œil admiratif  et attentionné qu'il jeta à mon modeste manuscrit valut tous les prix littéraires qu'on peut espérer.

C'est ma prof de français Brigitte Duroux, originaire de Mimizan, qui me fit faire un second grand pas dans l'écriture.  
A l'occasion d'une rédaction libre, où il s'agissait d'inventer une histoire de chevalier à la manière de Chrétien de Troyes (que nous avions étudié) elle s'étonna de la richesse de mon imagination et de ma faculté à découper les scènes de façon à ménager du suspens. Il fut dès lors décidé que j'irais vers un BAC littéraire. Il est vrai que j'avais pris un plaisir certain à cet exercice et ces appréciations eurent un effet stimulant.
Sans forcer ma nature ou me présenter cela comme une obligation, elle me parla de passionnée de lecture à passionné de lecture. J'aimais les récits d'aventure et les intrigues policières ? Très bien ! Est-ce que je connaissais le style héroïc fantasy ? Est-ce que je connaissais Agatha Christie? Répondant non à tout, elle entreprit de me faire un résumé si accrocheur et si haut en couleur que j'eus envie de lire ce qui semblait tant l'emballer. Alors, seulement, j'abandonnai le club des cinq et ses intrigues assez basiques. Je lus Tolkien "Bilbo le Hobbit", Abraham Merrit "La nef d'Ishtar", les nouvelles de science-fiction d'Asimov, et "les dix petits nègres" d'Agatha Christie.
Mes horizons de lecture s'élargissant , je constatai, comme me l'avait promis Brigitte Duroux, que mon vocabulaire et ma réflexion augmentaient en proportion.

Malheureusement, la passion que je vouai au club des cinq se transféra aux romans d'Agatha Christie, et j'eus là aussi un nouveau cycle monomaniaque, atténué toutefois par le programme scolaire qui imposait à l'époque de découvrir des classiques de la littérature. Cela permit de maintenir l'alternance.
Je m'aventurai à écrire quelques nouvelles, mais le résultat ne me satisfaisant pas, elles finirent à la corbeille. A l'âge où on a une vision, soit toute noir, soit toute blanche des choses, il est vrai que lire du Balzac et du Flaubert et se rendre compte que son propre style est loin de ces auteurs confirmés, a de quoi décourager toutes velléités littéraires.
Un autre choc me tomba dessus en quatrième: "le grand Meaulnes".
C'est la première fois que j'ai pris conscience de la force des mots et de l'impact sur l'imaginaire. Je vis le décor, je sentis les odeurs, je touchai les personnages. Un échafaudage d'images et de sensations diverses s'était installé dans ma tête, que je pouvais monter et démonter à volonté. Pour moi, Alain-Fournier est un impressionniste de la littérature au même titre que Zola et Hugo que je découvrirais un peu plus tard. La lecture de cette oeuvre reste associée à ce long hiver 84 durant lequel nous fûmes privés d'électricité pendant 5 jours d'affilé, la neige et le froid ayant paralysé le réseau. Je me revois enfoui sous une épaisse couche de peaux de mouton, déchiffrant dans le halo de ma lampe torche les vieilles pages de cette édition livre de poche des années cinquante, sentant bon le vieux papier jauni et poussiéreux. Cela aida probablement à me propulser si efficacement dans l'histoire, l'époque et l'atmosphère du livre. Le lecteur que j'étais se désincarna littéralement sous la force des mots d'Alain-Fournier. Finalement il fallut ce livre pour me rendre les classiques de la littérature moins rébarbatifs (mission que Madame Bovary avait échoué à remplir).



2 commentaires:

  1. c'est drôle, j'ai lu les mêmes choses presque au même moment (sauf le club des 5); par contre, j'ai bien aimé Madame Bovary !

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    1. Ce qui explique nos sensibilités si proches... ;-)
      Moi j'ai bien aimé Madame Bovary quand je l'ai relu à 28 ans.

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