mercredi 20 novembre 2013

Récit d'un drame familial

Figurez-vous qu'il est des drames familiaux réparables. Je viens d'en vivre un récemment que je tenais à partager avec vous.
J'ai une mère qui aime les armoires bien rangées et les maisons propres, il n'y a qu'à voir ses piles de linge rangées au carré dans sa penderie qui feraient douter que le militaire de la maison ce fut papa.
Or, à l'occasion d'un de ces après-midi brumeux automnales où son plumeau frétillait d'entrer en action, elle entreprit de ranger les chambres de la mansarde qui accueillent encore parfois les enfants sûrement ingrats que nous sommes. Elle commença par les tiroirs des tables de nuit parce qu'il faut bien commencer par quelque chose.
Ces tiroirs sont ceux que nous avons souvent explorés alors que nous étions encore baveux ou boutonneux et ils ont continué à être actionnés fiévreusement par la génération suivante tout aussi baveuse et boutonneuse que nous l'avions été.
Pourquoi ces tiroirs ont-ils été si souvent explorés me direz-vous et fonctionnent encore après tant d'années ?
Je répondrai à la première interrogation que c'était les tiroirs aux contes et aux histoires merveilleuses et à la seconde que Ikea n'existait pas encore a l'époque et que l'industrie du meuble savait encore faire du durable... Mais c'est un autre débat...
Figurez-vous que maman a dû trouver ces tiroirs plus jolis vides puisqu'elle entreprit, sans convoquer le conseil de famille, de les vider illico et de glisser tous ces billets gratuits pour voyage merveilleux dans des vieux cartons aux armes d'un chasseur de rêves adverse.
A l'occasion d'un des rares week-end où je me rappelle avoir des parents, tombant par hasard sur le nouveau vide créé par la ménagère consciencieuse, je me penchai un brin  halluciné  sur le tiroir et lançai un "allo !?" dont l'écho Nabillesque résonne encore cruellement à mes oreilles (matraquage télévisuelle efficace). Non mais je rêve : tous mes bouquins d'enfant envolés !! Volatilisés ! Supprimés ! Je regarde d'un peu plus près, croyant comme les enfants du monde de Narna qu'un double fond va se révéler à mes yeux et me permettre de repartir au pays des rêves. A moins qu'ils n'aient pris la fille de l'air comme le soulier de la vieille Marie-Rose... Mais je dois me rendre à l'évidence : plus de Mowgli, plus de Peter Pan, plus de vache Roussette, ni de Pouf le chat bleu et de gros ours Grognon.
Tous enlevés !
Encore un coup du capitaine Crochet.
Mais ce jour là mon capitaine Crochet à moi c'est ma mère qui a bien toujours sa main droite, elle, bien que je ne la distingue plus très bien de son plumeau magique, et s'étonne que je m'émeuve de la disparition de mes compagnons de lecture.
- Qu'est-ce que t'en aurais fait à ton âge ? Me dit-elle d'un ton désinvolte.
D'autres auraient été pris au dépourvu par la question à demi soupçonneuse.
Pas moi.
J'ai toujours assumé mon côté enfant et l'ai entretenu soigneusement (inconsidérément diront d'autres). Elle ne se rend pas compte qu'elle vient de me barboter ma poussière de fée, mon élixir de jeunesse, ma madeleine disneyenne. Elle vient de couper le haricot magique qui me menait droit au pays des Géants.


 Je lui réponds tout de go :
- J'aurais continué à rêver. C'est le patrimoine familial. Mes souvenirs.
J'ai l'impression que la société du virtuel, l'esprit kleenex ont pris possession de ma pauvre maman mais n'ai pas le cœur à l'exorciser pour le moment, tout dépité que je suis.
Comment lui dire que c'est un morceau d'elle-même, de moi, de nous, qu'elle vient de jeter négligemment aux orties ?
Comment lui dire qu'en ouvrant chacun de ces livres, qu'en en feuilletant les pages renaissaient plus vivement ma petite chambre et son papier peint aux images du livre de la jungle, que j'entendais de nouveau plus présente sa voix douce et tendre qui me faisait frémir aux mots d'OGRE et de LOUP ou me rassurait sur le sort des sept chevreaux ou du chaperon rouge (eh oui dans ce monde tout finit toujours bien et on renait avec seulement quelques traces de suc gastrique sur sa capeline rouge) ?
Comment lui dire qu'avec ces livres je revoyais plus ardemment ses yeux protecteurs et attendris se poser sur moi en même temps qu'elle remontait la couverture jusqu'à mon menton ou pendant que je buvais mon petit verre d'eau sucrée pour passer une bonne nuit (quelle vessie j'avais en ce temps là !!) ?
Oui, comment lui dire que ces livres c'est sa main douce et chaleureuse sur ma joue, les dizaines de petits yeux de mes ours en peluches installés en rang d'oignons au bout de mon lit sous le halo jaune de ma lampe de chevet ?


 Comprendrait-elle que l'homme de quarante ans à la barbe hirsute et aux pattes d'oie, qui aujourd'hui la regarde effaré, fait encore équipe avec le petit garçon qu'il fut hier, à la vie à la mort ?
Elle finit par me répondre qu'elle les a donnés. A qui ? Une association ? Des gens malheureux qui n'ont pas accès à la culture ?
Mon cœur est soulagé.La méchante reine au miroir n'a pas ensorcelé maman. C'est sa générosité qui lui a fait commettre cette erreur.
Disons aussi à sa décharge qu'elle est maintenant davantage grand-maman et que ces souvenirs ont sûrement été remplacés par ceux plus récents de la félicité apportée par ses petits enfants à qui elle a dû raconter ces mêmes histoires. Comment lui en vouloir d'avoir oublié ce petit garçon rêveur jamais rassasié de ses talents de conteuse ?
Elle vit avec son temps. Je crains soudain de la trouver un jour aux manettes d'un jeu en wi-fi, occupée à trucider des personnages de conte, bons ou méchants, car , en 2013, il n'y a plus de différence entre les uns et les autres. Le cynisme ambiant veut que la naïveté et l'innocence soient montrées du doigt comme des tares absolues à éradiquer. Mais je ne peux accepter qu'elle s'installe dans ma mémoire, dans ma chambre d'enfant, vêtue désormais d'un treillis, la mitraillette en bandoulière !!
Je dois sauver le soldat maman et retrouver ces livres afin qu'elle se souvienne. Je dois retrouver mes racines d'auteur.


Comme je suis plutôt du genre à voir le verre à moitié plein,  rassuré que ces livres, s'ils avaient changé de famille, puissent continuer à remplir leur fonction, je passai donc à la solution.
Comment reconstituer mon trésor ?
Priceminister.
Ce site de vente d'occasion à l'instar de ebay et du boncoin permet d'acheter à prix bas et de revendre ce dont vous n'avez plus besoin. Une nouvelle manière de consommer. Mais il permet aussi de retrouver des livres anciens, des raretés. Heureusement je sais exactement le visage des disparus et leur titre (pas toujours exact car j'ai quand même la mémoire qui flanche) et parvient à tous les retrouver sur le site. Je viens aujourd'hui de recevoir le septième récupéré. M'en reste autant à accueillir.
Quand ils arrivent dans ma boîte à lettres, j'ai l'impression de retrouver de vieux amis, des parents perdus de vue. Mon tiroir magique se reconstitue peu à peu.
Je l'annonce triomphant à maman qui considère d'un œil circonspect cette nouvelle fantaisie de son grand gamin et me dit :
- Qu'est-ce que ça change ? Tu les connaissais par coeur de toute façon... Et puis maintenant c'est toi qui les raconte les histoires.
Alors là, pour le coup, je suis désarçonné.
Je me rends compte que, s'il est important de se souvenir d'où l'on vient, ce que ce passé a fait de nous à l'instant présent est tout aussi précieux, et que bien des choses restent encore à accomplir.
Maman, d'une simple phrase, vient de poser son plumeau exterminateur pour m'introniser auteur, et c'est pour moi la plus belle des légitimités.
Une maman aime naturellement ce que vous fûtes, ce que vous êtes et ce que vous serez et ne souhaite rien de plus que de vous voir marcher tout seul, toujours droit devant, avec la confiance et l'assurance d'un homme fait homme.
Maman je t'aime.








jeudi 7 novembre 2013

Les projets se ramassent à la pelle...

Le temps passe à une allure folle et je me rends compte que je me suis laissé un peu déborder. Si vous n'avez pas eu d'article pour octobre c'est pas faute d'actualité mais plutôt dû à une atteinte de procrastination aiguë...


Alors rentrons dans le vif du sujet. Les petits feux de cheminée qui s'allument sont propices à une remontée d'intérêt pour "Le tombeau des moines" (et j'espère que ce n'est pas juste pour servir à allumer les buches ;-)) Cela fait chaud au cœur.
Les commentaires continuent d'arriver toujours encourageants.
Ainsi ma collègue qui, en pleine réunion, me lance un déstabilisant : "Maintenant quand je vous vois, je vois Pirouly et toute la bande courir la campagne. Je pourrais même vous décrire la crypte qu'ils  ont découverte." Ses yeux pétillent et son sourire est ravi.  Moi aussi je suis ravi de l'avoir emmenée aussi efficacement dans l'univers de mes petits personnages.
Ou encore mon cher illustrateur, Laurent B., qui me remercie de lui avoir fait ressentir ses émotions de jeunesse dans la scène où les quatre héros découvrent le livre de P. Michaud bien installés au chaud dans la chambre de Martinou éclairée par une petite lampe de chevet...
Merci aussi à Chantal et Dédé le cantonnier qui ont manifesté récemment leur intérêt (et leur enthousiasme) pour mon histoire. Cela me touche d'autant plus qu'ils font partie de ces figures Liancourtoises dont je me souviens toujours avec émotion (c'est bien pour ça que Dédé est un des personnages bienveillants de l'histoire).
Ces remarques sur mon sens de la description et de l'ambiance arrivent à point nommé puisque, à la relecture des premiers chapitres du second tome des aventures des M and P's, je commençais à douter des passages descriptifs, de leur utilité et de leur longueur. J'ai testé mon nouveau style narratif, les efforts faits sur les dialogues et la description des personnages sur mon lecteur témoin. Ses réactions ont été positives et m'ont très vite rassuré.


Un tiers du "Clown ne rit plus" est déjà rédigé. En parallèle, je remets au propre en tapant mon texte manuscrit sur ipad (l'angoisse de perdre mes carnets papiers), tout en songeant à la scène suivante. J'avoue que chaque chapitre demande une préparation documentaire et une visualisation mentale plus précise que lors du précédent opus. Il faut savoir que je jongle là avec près de vingt personnages et une intrigue à trois niveaux quand "le tombeau" n'en comportait qu'une, avec 5 à 6 personnages tout au plus (et je ne compte pas les héros principaux). C'est comme une partition musicale, chaque personnage, chaque réplique a sa place et son tempo. C'est jubilatoire. Mais ça demande du temps et de la disponibilité.
Aussi me trouve-t-on beaucoup le nez en l'air actuellement et mon esprit s'échappe régulièrement dans Barroy et dans les coulisses de ce cirque, dans l'ombre des M and P's...
Surtout ces temps ci où je dois me lancer dans la narration d'un barbecue nocturne organisé par la troupe d'artistes du cirque avant la grande représentation, scène importante où il faut donner la parole à chacun et disséminer quelques éléments de l'intrigue tout en exposant les rapports entre chaque personnage. Un travail de cameraman presque, où il vaut mieux savoir d'avance où l'on va poser ses pieds et fixer son objectif...


J'ai échangé récemment avec mon illustrateur Laurent B. et une deuxième collaboration sur une couverture est en phase d'élaboration. J'en profite pour préciser que vous avez été nombreux à apprécier son travail sur "le tombeau des moines" et me demander une dédicace de sa part. Laurent à ton plus beau stylo !! C'est ton tour. On ne change pas une équipe qui gagne.
En effet je mets une dernière touche à un recueil de textes qui devrait être prêt début 2014. Ce recueil s'appellera "Mes semelles de vent".
Il est prévu aussi qu'il travaille sur la couverture du "Clown ne rit plus". Rassurez-vous, vous aurez donc l'occasion qu'il vous réserve (et à moi aussi) encore de jolies surprises.



J'attends aussi mon code ISBN demandé auprès de l'AFNIL avant de déposer à la BNF un exemplaire de mon premier livre.

Voilà pour les nouvelles !! Vous voyez elles sont nombreuses et réjouissantes.
Merci de votre suivi et je vous souhaite le meilleur jusqu'au prochain article,

amicalement,

Thierry